P194 — Drôle de cirque — Kanga
Percy et moi ça me désespère.
Perdu dans son repaire, où je suis persona non grata, il m’exaspère. Souvent, il s’occupe à perfectionner son super-numéro d’animaux savants : perdrix et perdreaux, perroquets et perruches grimpés sur un perchoir auprès d’un épervier qui les guettent d’un oeil perfide des éperlans plein le bec, tandis qu’une persane aux yeux pers est perchée en équilibre sur le dos d’un percheron pervers, qui tourne perpétuellement au son du sifflement perçant d’une vipère lubrique. Percy les persécute avec des perce-oreilles, afin qu’ils exécutent ce répertoire percutant sans une faute, spectacle d’expert hyperbolique dont il espère la prospérité pour payer le percepteur qui le menace de perpette.
Sinon il concocte à longueur de temps un médicament, une poudre de perlimpimpin pour son grand-père hypertendu et perclus, qu’il a persuadé d’être son cobaye. Il mélange en vrac dans son percolateur du persil, des pervenches, des asperges, des angiospermes, de la piperade et du permanganate, un remède personnalisé qui peut aussi soigner les compères-loriots et les œils-de-perdrix, qu’il vendra peut-être demain au supermarché.
Et moi, sans repères, je voudrais vivre, voir du pays. Je ne demande pas le Pérou, Perth ou la Perse, des pays perdus. Perpignan, j’en rêve, ou Epernay, Perros Guérec ou même Levallois Perret.
Je veux aussi un bébé, un petit père que j’appellerais Perceval ou Prosper. Une fille, ça serait Perséphone ou Perla... Quand même pas Perpétue ! Tiens, Eperluète, c’est joli Eperluète et maintenant c’est permis.
Je suis persuasive, mais lui ça l’exaspère, ce personnage persifleur, il vitupère son refus.
Saperlotte, s’il n’obtempère pas, je vais illico chercher d’autres pères.
Éperdue, mais résolue, j’asperge de parfum ma robe de percale. Je connais deux compères qui coopéreront : un superbe desperado impertinent et un skipper permissionnaire en imper, que j’ai aperçus hier, figurants dans une superproduction tournée chez moi, à Quimper.