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Le blog des Poudreurs d'escampette

27 novembre 2014

Proposition 209 — Incipits littéraires

Plume7

   Parmi la liste des titres des derniers romans de la rentrée, en choisir un qui sera le titre de votre texte perso et inclure tous les autres dans le corps de votre écriture  comme dans un logo rallye.

  • L’oubli ( Fréderika Amalia Finkelstein )
  • Et rien d’autre ( James Salter )
  • L’amour et les forêts ( Eric Reinhardt)
  • Le ravissement des innocents ( Taiye Selasi )
  • Photo volées ( Dominique Fabre )
  • Splendeurs et misères de l’apprenti écrivain ( Jean-Baptiste Gendarme )
  • Hilda ( Marie N'diaye )
  • L’urgence et la patience ( Jean-Philippe Toussaint )
  • Eros émerveillé ( colllectif )
  • Le fromage ( Jean Pruvost )
  • On ne peut plus dormir tranquille quand on a une fois ouvert les yeux ( Robert Bober)
  • J'ai voulu voir ( Gilles Caron )

     

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27 novembre 2014

P209 — Rien d'autre — Zélodie

  

Zélodie5

   Chère Marie,

   Je reviens de trois mois de silence complet et vois à ma liste de mails que tu m'as cru disparue. Je m'octroie pourtant chaque année ces 12 ou 13 semaines de retraite. C'est l'oubli complet , l'amour et les forets, rien d'autre.

   Oh ce n'est  pas Eros émerveillé j'ai passé l'âge mais une tendresse légère au gout de pépins de pommes et de groseilles, le ravissement des innocents.

   Cette année j'ai voulu voir ma cousine Hilda, qui traduit Joël Dicker en allemand. C'était la mauvaise idée de l'été. Mon époux descendant de ses arbres a décrété que ce serait fatigant avec toute la ribambelle d'enfants de sa famille recomposée. La maison est en perpétuelle ébullition et la pauvre cousine oscille entre l'urgence et la patience. Notre seul bénéfice fut de prendre quelques kilos en tombant dans une vraie boulimie concernant le fromage. Les camemberts fermiers et autres neufchatel, les pont-l'eveque affinés à la cave étaient sublimes et nous avons succombé à la gourmandise au mépris des conseils avisés du cousin médecin.
   

   Je ne suis restée qu'une semaine et m'oblige, depuis, au régime. je te joins quelques photos volées prises par les enfants lors de nos écarts de table. Tu connais mon horreur psychotique de l'objectif et ma nervosité proverbiale quand je dois prendre la pose. Cette fois mes rides et mon âge semblent disparaitre dans une gourmandise riante. Je ne t'en dis pas plus, tu vas bien rire de mes joues rebondies et des mes airs extasiés.

    Mes nuits sont calmes, je n'ai plus ces pannes de sommeil au petit matin, à ce moment où, avec le jour naissant, on ne peut plus dormir tranquille quand a une fois ouvert les yeux. C'est mon moment favori pour attraper la plume et écrire mes meilleures pages. J'entends d'ici ton soupir !

   Je n'ai touché ni la plume ni le clavier. Quel soulagement pour moi d'oublier un été les splendeurs et miséres de l'écrivain débutant en me retirant à la campagne. Je sais l'éditrice en toi desapprouve... j'étais sur la bonne voie, j'avais trouvé mon style et et... non je ne baisse pas les bras devant les relctures, les corrections ... non je me ressource noyée dans le parfum des roses, bercée par l'épluchage des pommes reinettes au chant des oiseaux. Bref malgré la météo changeante et toutes ces complaintes sur la pluieje rentre revigorée de mon séjour dans le Bray. tu vas me retrouver prête à ferrailler contre la ponctuation, fervente adepte du dictionnaire des synonymes et d'attaque pour reprendre tous mes chantiers. L'éditrice passionnée que tu es en seras ravie, j'en suis sure
   
Toutes mes amitiés avant nos retrouvailles parisiennes 

 

Nathalie 

 

27 novembre 2014

P209 — Photo volée — Éliane


sac4

   Bernard se tournait et se retournait dans son lit, en vain. On ne peux plus dormir tranquille quand on a une fois ouvert les yeux.

   « J’ai voulu voir ? Et bien, tant pis pour moi. Maintenant il va falloir vivre avec… » se répétait-il.

   Certes il n’aurait pas dû fouiller dans le sac de la jeune femme, il en était bien conscient. Si jamais elle l’apprenait, elle ne lui pardonnerait jamais.

   « Je ne dirai rien, j’attendrai qu’elle m’en parle » avait-il décidé.

   Mais ce mystère lui gâchait ses jours et ses nuits. L’oubli était impossible…

   Au point qu’il n’arrivait plus à écrire une seule ligne. Cela lui était déjà arrivé autrefois : angoisses devant la page blanche, excitation quand tout à coup les idées se bousculent si vite qu’on n’a même plus le temps de les noter. Splendeurs et misères de l’apprenti écrivain, oui, il connaissait.

   Mais là, c’était différent. Il était obsédé par une image, et l’angoisse le paralysait.

   Tout avait commencé il y avait six mois à peine. Il était en vacances dans une résidence de rêve, à Koh Tao, petite île perdue au sud du golf de Thaïlande. Un coin pour touristes friqués: des Européens bien sûr, Français, Allemands, et, de plus en plus nombreux, des Russes, nouveaux riches vulgaires et exigeants; mais aussi des Américains à qui tout était dû… Tout ce monde là vivait en vase clos, ne sortait pas de l’hôtel et n’avait aucun contact avec la population locale, hormis les serveurs et les femmes de chambre. Il lui arrivait de regretter alors ses voyages d’autrefois, quand il était plus jeune et qu’il se déplaçait sac au dos, mêlé à la population.

   Mais ce genre de séjour avait des avantages bien sûr. Les bungalows étaient très confortables et la nourriture excellente, même si une seule chose manquait, comme partout ailleurs en Asie : le fromage, question d’habitudes alimentaires. Mais pour quinze jours, il pouvait s’en passer.

  C’est dans ce cadre idyllique qu’il avait rencontré Hilda, plus jeune que lui à l’évidence mais cela ne semblait pas lui poser problème. Dès le premier instant, il en était tombé amoureux. Sans doute, Eros émerveillé par tant de beauté lui avait-il décoché une de ses flèches empoisonnées ! Depuis, il ne cessait de penser à elle et tout ce qu’il désirait désormais, c’était d’être près d’elle, et rien d’autre.

  Ils avaient passé là-bas des jours merveilleux. Le soleil, l’amour dans des bungalows montés sur pilotis, la plage, et autour, les forêts mystérieuses… Oui, c’était cela dont il se souvenait surtout : l’amour et les forêts. 

   Il avait déjà ressenti quelques fois ce sentiment amoureux, le ravissement des innocents qui vous rend un peu stupide et qui fait que le monde alentour s’estompe et perd toute importance. Mais cet éblouissement réciproque n’avait jamais duré bien longtemps. Là, c’était différent. Même rentrés en France, ayant repris leurs vies « d’avant », ils avaient continué à se voir et à s’aimer.

   Alors, était-ce parce qu’il avait vieilli qu’il se sentait si vulnérable face à la jeunesse d’Hilda ? Ou parce qu’il sentait que la jeune femme lui cachait quelque chose ?

   Il y avait quelqu’un dans sa vie, il en était sûr. Il l’avait surprise une fois en train de replacer  vivement ce qui ressemblait à une photo au fond du sac de toile multicolore qu’elle trimbalait toujours avec elle. Quand elle s’était aperçue qu’il l’observait, elle avait légèrement rougi…

   Alors, il fallait qu’il voie cette photo, il fallait qu’il sache. Il y avait urgence, sinon il allait devenir fou. Mais comment faire ? Elle gardait toujours son sac avec elle quand ils étaient ensemble. Il lui fallait attendre le moment propice. L’urgence et la patience, comment concilier les deux ?

   Enfin, l’occasion s’était présentée.

   Un soir, elle s’était absentée quelques instants, laissant son sac au pied du lit. Il avait hésité, et puis il avait délicatement plongé la main dans une poche intérieure, puis dans une autre. Il avait saisi le porte feuille, l’avait ouvert rapidement… et la photo avait glissé sans difficulté entre ses doigts.

   D’abord stupéfait, il s’était vite ressaisi et n’avait eu que le temps de remettre l’objet à sa place. 

   Et maintenant qu’il avait vu, il ne savait plus que faire de ce secret ainsi dérobé…

 

 

26 novembre 2014

Proposition 208 — Objets inanimés...

Plume7

   Prenez un objet banal…

   Sortez le de son contexte habituel et donnez-lui la parole…

   Il va vous faire de drôles de révélations…


26 novembre 2014

P208 — Page ou l'intangibilité du ciel — Raynald

 

tablette4

    Il me serre dans sa main de toutes ses forces. Il craint de m'échapper par terre. Je devine à sentir la chaleur moite de sa peau qu'il a peur. Je suis assez fragile, un peu à son image quoi ! Il fait de l'anxiété mon proprio. Il s'effraie pour un rien. Il pète les plombs et se met à tourner en rond. J'en ai alors le tournis, et j'ai peur à mon tour. Peur de vomir, de ne plus pouvoir retrouver le sens de l'horizon. Après quelques circonvolutions de derviche, je m'en fiche. Je me dis que jusqu'à preuve du contraire, je me replace toujours dans le bon sens. 


   Je l'entends souvent crier à qui veut ou peut l'entendre, ne toucher pas à ma tablette. Elle m'est si précieuse. Et elle coûte cher aussi. Elle est très très très dispendieuse. 

   Il m'aime d'une passion sans borne. Je le sais à sa manière absolue de me manipuler. Il est fou de moi. Et c'est tout à fait normal, car je suis douce, chaude au touché, brillante comme cela ne se peut pas, et si rapide, qu'il en est souvent ébahi.

   Je l'accompagne partout, même que parfois, je prends trop de place. Il en oublie qu'il pourrait utiliser d'autre médium pour écrire ou communiquer. Stylo papier, ordi portable, dictaphone, enregistreur, café repas, téléphone cellulaire, vive voix.

   Il m'appelle Page. Avez-vous vu Page par hasard ? Je l'avais laissé au salon sur le buffet. Est-ce que quelqu'un saurait où est Page ?

    En réalité, Page est une partie interne de mes cellules. Un logiciel d'écriture qui fonctionne à merveille avec un clavier tactile intégré. Moi j'aime à dire à qui veut m'écouter que je suis la logique au ciel du meilleur logiciel d'écriture qui existe jusqu'à maintenant pour tablette. Je suis aussi et surtout un ensemble de données mathématiques concrètes dans l'intangibilité du ciel. Des Zéros et des uns en combinaison de possibilités infinies.
   
   En fait, je représente son aspect rationnel qui s'amalgame sans vraiment qu'il le réalise à sa capacité poétique de création. L'union entre la raison et la passion. Les connexions neuronales entre son cerveau droit et gauche. Le trait palpable reliant mes nombres et son imagination fertile.


   Mon pote est un poète apprenti écrivain pour sa satisfaction personnelle, il n'a jamais réellement tenté de publier sérieusement ou en de rares occasions.

   Entre nous, je peux vous avouer qu'il a peur du jugement. Comme si un ou plusieurs refus seraient le gage de sa médiocrité.

 

 

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26 novembre 2014

P209 — Effilochée — Olivier

 

effilochee3

 —  Bien mademoiselle, racontez-moi comment cela vous est arrivé.

   — Sniff… Monsieur l’agent, je ne sais pas par où commencer. Comment vous dire que l’on était comme deux sœurs. Aussi loin que je m’en souvienne, on était toujours ensemble, même si on n’avait pas toujours les mêmes goûts vestimentaires. Moi j’aimais bien être coordonnée, sans être trop enserrée, parfois même m’aventurer à l’air libre. Il nous est arrivé de passer parfois du temps, un peu coincées, comme recluses, mais on a tout de même fait un sacré bout de chemin et toujours à l’unisson, parfois fourrées où il ne fallait pas mais totalement inséparables. Elle se souciait peu de savoir comment on était affublées et ne méprisait pas de s’aventurer dans des contrées malodorantes qui nous amenait immanquablement à un bon bain et un rafraîchissement de rigueur. Je préférais d’ailleurs quand tout cela se faisait à la main, avec beaucoup plus de douceur, au point dans dégouliner de plaisir. Mais les temps ont changés, on nous impose désormais la sainte plongée hebdomadaire mécanique, privée de toute intimité où l’on se retrouve entremêlées au milieu d’une foule bigarrée qui me procure un long moment d’angoisse. Cet imbroglio me donne généralement le tournis, au point de parfois m’en étouffer. Je vous assure que dans ces moments il y a de quoi être déstabilisée, d’autant que c’est toujours dans ces occasions que l’on se perd momentanément de vue, de façon cyclique, entraînées que nous sommes dans ce tourbillon bouillonnant mené tambour battant. Il fallait bien que cela finisse par arriver. J’avais d’ailleurs ce jour-là une horrible sensation de naufrage.

   — Bien, mais au cours de vos précédentes ablutions hebdomadaires, il n’y avait jamais eu d’incidents précurseurs ? Vous vous êtes toujours facilement retrouvées ?

   — Au oui monsieur l’agent, on finissait toujours par se rejoindre pour mieux baguenauder, moi à droite et elle à gauche, ou vice et versa. Non, jamais séparées et rarement mal accompagnées. On s’aventurait d’ailleurs beaucoup moins l’hiver, vu que nous sommes d’une nature fine et peu armées pour affronter le froid, mais on en profite bien le reste de l’année.

   — Ce qui me chiffonne, c’est qu’en aucune occasion vous ne vous êtes aventurée seule.

   — Pour être honnête, il nous est arrivé d’être parfois un peu distante, mais jamais au point de se perdre définitivement de vue. Ça nous est arrivé, certains soirs où elle restait dans le salon pendant que je passais la nuit dans la chambre et ce souvent suite à un subit empressement, si vous voyez ce que je veux dire…

   — Hm, d’accord, mais cette fois vous l’avez définitivement perdue de vue, si je comprends bien.

   — Entraînées par le tourbillon de la vie en somme… On était là, toute deux, bonne à mettre dans le même panier, au milieu de tout un ramassis défraichi, mais rassurez-vous on avait bien l’habitude d’être mêlées à tout ce fatras. Donc c’était dimanche dernier, nous nous sommes rassemblés pour notre immersion dominicale. Au début on est un peu chahutées, voire retournées, emmêlés les uns aux autres. On s’entrevoit entre deux cycles, dès que la tête arrête de nous tourner. Arrivé au tourbillon final, où je perds toute notion d’environnement, je prends le temps de chercher où elle a bien pu partir tournoyer elle-même. Malgré que l’on soit complètement désorientées, on finit toujours par se retrouver après la sortie… Mais là, J’ai eu beau regarder partout autour de moi, à gravir les cols, à m’immiscer entre tous les entrejambes, rien, plus aucune trace d’elle.

   — Mais comment est-ce possible puisqu’au tambour il n’existe qu’un accès pour entrer et sortir ?

   — C’est bien ça le mystère, monsieur l’agent, c’est que le manque d’échappatoire ne l’a pas empêché de se volatiliser.

   — Tout ceci est bien étrange et soulève bien des questions…

......

   — Chéri…

   — Oui ?

   — Si tu arrêtais de jouer avec ta chaussette et que tu finissais de te préparer pour ne pas être en retard au poste ?

   —  Oui, tu as raison. Tu n’as toujours pas retrouvé l’autre ?

   — Non, et pourtant je t’assure que j’ai regardé partout après ma lessive hebdomadaire.

   — La malédiction de la chaussette perdue a encore frappé.

   — J’en ai bien peur. Allez viens boire ton café, je te fais confiance pour résoudre cette affaire plus tard…

 

 

26 novembre 2014

P208 — Vie et mort d'un doudou — Domino

 

doudou1

   Cette fois-ci, Raphaël  m’avait laissé tombé entre le mur et le lit, juste dans l’angle de la chambre où il dormait chez sa grand-mère. Un endroit assez poussiéreux où l’on trouvait même quelques toiles d’araignée. Mamie à qui l’on a téléphoné dès qu’on s’en est aperçu dans la voiture, m’a retrouvé et m’a renvoyé à Paris par la poste.

  J’avais pourtant l’habitude d’être perdu dans les endroits les plus insolites qui soient : cabine d’essayage, salle d’attente de médecin, bistrot de la gare, photomaton du métro, placard à balai de Mamie, bac à légumes du frigo, lave-vaisselle… Mais chaque fois on avait réussi à me récupérer dans les 24 heures, à me nettoyer sommairement grâce à un passage à trente degrés dans le lave-linge puis dans le  sèche-linge, afin d’être de nouveau présentable pour le seul rôle auquel je suis destiné, celui de l’endormissement de mon petit maître. Je ne vous raconte pas comme ces traitements m’ont usé. A chaque fois,  j’en suis sorti lamin

   Dans le premier tambour, valser dans tous les sens, les oreilles d’un côté, les pattes de l’autre, gorgé d’eau chaude à gonfler comme une outre pour la rendre dans un tourbillon centrifuge qui me mettait la tête à l’envers pour plusieurs heures. Ensuite passer au séchage dans le deuxième tambour et supporter des températures inhumaines pour un doudou, dans un air si chaud et sec qu’il me faisait suffoquer chaque fois. Petit à petit, ma couleur s’est ternie, mon ventre s’est mis à boulocher, une de mes pattes s’est un peu décousue et malgré les points de raccommodage de Mamie, j’ai perdu un peu de substance dans la droite. 

  Évidemment, je sentais bon en sortant de là, enfin pour la maman de Raphaël, parce que pour lui, je n’étais pas tout à fait le même. Il cherchait toujours l’oreille la plus pelée pour en glisser la pointe grise dans  sa bouche et essayer de retrouver le goût qu’on lui avait ôté, par tout ce qu’on m’avait fait subir ! Moi, j’étais tellement heureux de le retrouver que je supportais tout sans jamais me plaindre.

   À moi, les secrets trop lourds et les larmes amères des premières séparations, mais aussi les rires en cascades et les grands bonheurs, j’ai tout partagé avec lui, les rêves comme les cauchemars, logé  au creux de son épaule. Quand Raphaël était tout petit, il me traînait partout, dans le parc, sur le pot, à table quand il mangeait et bien sûr dans son lit, j’assistai à tous les rituels de son  quotidien. Ensuite, il a fallu qu’il me laisse à l’entrée de la classe maternelle dans un grand panier où tous les doudous étaient déposés jusqu’à l’heure de la sortie. Puis, il m’a laissé dans son lit, le matin en partant à l’école mais je faisais encore partie de tous les voyages et ne quittait jamais son pyjama dans les bagages. Et hier, il est reparti en m’oubliant chez Mamie.

   Anna est arrivée depuis quelques semaines. Raphaël est allé avec son papa lui choisir un doudou pour qu’elle le trouve dans son berceau en rentrant de la maternité. Depuis que le facteur m’a déposé à la porte de Raphaël, il ne m’a plus regardé de la même façon, je crois même que c’est son père qui m’a sorti du paquet. Raphaël m’a déposé au pied de son lit sans frotter son nez sur mon ventre J’ai compris que ma vie de doudou venait de s’achever.

   Le dernier soir avant que sa mère ne rentre, Raphaël m’a déposé dans le berceau rose et blanc qui attend sa petite sœur,  à côté du doudou tout neuf.

 

 

19 novembre 2014

Proposition 195 — Le répertoire de mes émotions

Plume7

   Dans l’ordre ou le désordre,  les émotions  (neutralité, euphorie, satisfaction, tristesse, colère, déception,  bouderie, stupéfaction.) devront se retrouver dans un récit construit. Ces émotions ne seront exprimées que par un seul personnage. (Utilisation du « Je » obligatoire !). Elles seront parfaitement justifiées et argumentées par les circonstances.


19 novembre 2014

P195 — Un lundi matin ordinaire — Zélodie

 

Un_lundi_matin_ordinaire2

   Lundi matin 8.15 salle 105

   Ah non, non, non. Rester calme, tranquille, comme ma voisine, la jolie Chloé. C'est trop vraiment trop. Bien sûr, je vais la jouer cool, neutre, mais tout de même, elle charrie la prof ! C'est pas possible : écrire un texte en allemand à propos de huit visages pour dire qui on recruterait et pour quel poste.

   J'affiche un air calme, neutre... elle serait trop contente de me fâcher… déjà je lui ai dit que j'aimerais jamais l'allemand...

   Ça fout les boules quoi ! Oui oui, suis carrément furax quoi. On revient d'un week-end dans la famille. Elle imagine pas la prof : retrouver papa-maman, ça rend quoi, moitié patraque moitié content fifty-fifty. On leur fait style boudeur, pour se faire désirer et parce que c'est le retour en arrière à l'âge bébé quoi !   On retrouve la petite amie de province, amie de collège, premier baiser... gentille mais bon... merde j'ai perdu son nom Aurélie, Valérie... Mélanie oui c'est ça ravie toute roucoulante, ça fait plaisir. Elle sait pas pour l'autre, celle qui est dans ma promo, avec moi au BDE, Océane un prénom classe. On part synchrone chacun dans sa province, faut gérer le timing, on apprend ça en école de commerce. Elle c'est dOrléans moi dans le 9 3. Ca nous prend presque autant de temps porte à porte.

    Côté nourriture, c'est l'euphorie, ça change de la cafèt et des repas dégueu… tous mes plats préférés : couscous sucré, tajine... délicieux au chocolat fait par ma petite sœur. Bref Maman me cajole par l'estomac, comme elle fait pour Papa, enfin faisait, parce que maintenant c'est ton père qui doit maigrir, faire du sport, bref la diète !

   Samedi matin, grasse matinée, on marche sur la pointe des pieds pour pas me réveiller. Je prends la caisse familiale, Papa me donne les clés. Tu fais attention, mon fils !

   Je vais voir mes potes. On se retrouve au café, plus dans la cage d'escalier. Y a des petits jeunes qui squattent notre coin, mais bon. On se raconte les dernières news, moi les études, eux le BTS au lycée, on boit un coke, c'est moi qu'invite. C'est pas top-top mais bon j'affiche content quoi mais pas trop. Sont un peu jaloux !

   Samedi soir : les plans s'écroulent, une centaine de SMS, quelle disco ? Quelle heure, quels copains... tout quoi super OK et non. Voilà pas qu'Aurélie veut plus, elle a dans l'idée une soirée à deux yeux dans les yeux, rien réservé, pas de potes, la cata, j'étais déçu, mortifié. On avait fait des plans et voilà tout revu à la baisse. Le caca sentimental, tout ce que je déteste : genre tu m'aimes toujours, tu m'aimes comment et patati et patata les larmes dans les yeux ! Une longue longue soirée, j'en pouvais plus... en plus à minuit fallait qu'elle soit rentrée, le papa ne plaisante pas avec les horaires !

   J'ai roulé mais rien à voir immeubles, petites scènes de négoce... voitures de police... vitesse interdite... déçu déçu je te dis pas ! Ça ne vaut pas Paris, moi la capitale je m'y sens bien, chez moi ! On critique mais c'est pas triste, y a du mouvement, des…

   La prof me regarde d'un air interrogateur. Je griffonne trois, quatre mots. Faudrait pas qu'elle me fasse lire, l'impro en allemand c'est pas mon truc ! C'est cool pour elle : 20 minutes à nous regarder bosser sur son idée de ouf. Ma parole ils écrivent tous, Jérémie tire même la langue ! Je sors mon  iPhone et je lui tire le portrait ! Au BDE on va bien rire ! Ils écrivent tous, j'y crois pas ! Les filles,  ça m'étonne pas, pour le taf, elles sont imbattables, mais les autres aussi. Ils ont des idées, se passent des mots... successful son idée !

   Sonnerie d'alarme ! Madame, vous avez entendu la sonnerie, faut sortir, mais si, faut sortir je vous dis. L'idiot qui a cassé la vitre je lui fais la bise. La surprise totale, totale… les espagnols avaient un test... je dirai pas de qui ça vient cette « surpraise » ! L'allemand version short, ça me va ! Oui oui on finira à la maison, oui Madame !

 

19 novembre 2014

P195 — Jus de mangue — Cloclo

 

jus de Mangue2

   Je sirote mon jus de mangue avec un plaisir non dissimulé, je sens qu’il le comprend aussi, bien qu’au départ, il ne m’ait prêté aucune attention. Bien calé sur sa chaise, dans une attitude un peu raide, mais élégante et digne tout de même, le regard lointain, semblant ne pas s’intéresser à moi, ni manifester le moindre sentiment. Je l’imite et fais comme lui, pourtant j’étais venue ici pour y trouver un peu de tendresse et de chaleur.

   Le bar n’est pas ce qu’on appelle un bar animé, c’est un endroit feutré, tout en douceur. Les clients sont discrets, très peu bavards, toute leur attention se porte sur leur voisin ou voisine. Après mon premier mouvement d’euphorie passée, je sens qu’il faut que je me calme, du moins que je ne saute pas les étapes. Il faut déjà faire connaissance, puis se jauger, se mesurer, voir si l’on va pouvoir mutuellement se plaire. C’est toujours un instant très délicat à vivre, car il suffit parfois d’un mauvais feeling, et crac, tout est fichu par terre. Il faut repartir à zéro et reprendre le parcours à ses débuts. Ce que je ne souhaite pas.

   C’est toujours un peu risqué, une première rencontre. A voir son peu d’enthousiasme à mon égard, mon cœur est envahi d’une légère tristesse, j’étais venue pour trouver un appui, une présence, un réconfort, et j’ai l’impression de me heurter à un mur. Un mur empreint d’une bonté bienveillante, certes, mais d’une sorte d’indifférence complaisante qui me déconcerte et me glace malgré un regard doux, profond, et de grands yeux verts qui me dévisagent et me donnent la chair de poule.

   Mes nerfs se nouent, tous les muscles de mon corps se tendent, mon cœur se serre dans ma poitrine, je suis dans une espèce de colère contenue qui ne demanderait qu’à exploser et à se libérer en d’autres circonstances. Mais la bienséance japonaise me l’interdit, ici, seul le sourire est de mise, les hochements amicaux de tête, les déférentes courbettes et les révérences aimables. Je risque un geste et une approche vers mon partenaire, il est à ma portée. Oserais-je lui tendre la main, esquisser un seul geste ? A ma grande déception, il n’a pas fait le moindre mouvement vers moi. Seule la moustache a peu frémi, c’est peut-être bon signe pour la suite.

   Je suis à deux doigts d’abandonner. J’ai bu trois jus de mangue, je commence à avoir l’estomac ballonné, la serveuse m’observe de loin d’un air de compassion.  Et mon voisin ne s’est toujours pas franchement manifesté. Tout à coup, grande stupéfaction, il s’élance d’un seul bond vers moi, se frotte contre ma joue, me réclame des caresses. Je passe ma main dans son long cou qu’il a très doux et duveteux. Et là, il se met à ronronner, comme un bon vieux matou qu’il est ou prétend être, je passe ma main sur son dos en remontant doucement jusqu’à la naissance du cou, lui titille la nuque et le bas des reins, un grand bonheur m’envahit, mon stress disparaît instantanément sous la chaleur de son corps.

   Le voilà maintenant endormi, étendu  sur moi de tout son long.  Notre bonheur est total. Je suis devenue la reine de tous les empires d’Orient et de tous les matins calmes.

   Je reviendrai, c’est sûr, car je crois qu’il m’a définitivement adoptée. Pas de doute, cette idée de bar à chats est une idée géniale, je pense que je vais en développer le concept dès mon retour en France.

 

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Changement d'adresse

poudreurs

   L'espace d'hébergement précédent étant devenu inconfortable, l'auberge des Poudreurs d'escampette a émigré chez canalblog. Nous allons à nouveau proposer à la lecture publique quelques textes choisis parmi les nombreuses productions mensuelles de l'atelier. Si le coeur vous en dit n'hésitez pas à venir nous rejoindre à l'auberge en envoyant un message à l'adresse suivante, vous y serez les bienvenus !
poudreursdescampette-subscribe@yahoogroupes.fr

Naissance d'un petit cousin

Feuille_érable  
   Les poudreurs d'escampette sont heureux de vous annoncer la naissance d'un petit cousin canadien né à Ottawa il y a peu. Nous lui souhaitons longue vie et beaucoup de créativité.

http://plumesdicietdailleurs.blogspot.ca

Propositions en cours

P210 – Mythologie au goût du jour

P210  
Trouvez dans cette liste le titre de votre nouvelle. Elle devra se dérouler à l’époque actuelle.

Le supplice de Tantale – Le tonneau des Danaïdes – La boite de Pandore – Le talon d’Achille – Le rocher de Sisyphe – Les écuries d’Augias –

P211 – Sur l’écran noir…

P212  

Parmi ces 6 répliques cultes de cinéma, vous en choisirez deux. La première servira d’incipit et la deuxième d’excipit à votre nouvelle

 
“ Les choses que l’on possède finissent par nous posséder” Fight Club. C’est l’angoisse du temps qui passe qui nous fait tant parler du temps qu’il fait” Amélie Poulain“. On peut convaincre tout le monde qu’on a changé mais jamais soi-même.”  Usual Suspect.  “La prochaine fois, y aura pas de prochaine fois.” Les sopranos“. La folie, comme tu dois le savoir, c'est comme la gravité: ça ne réclame qu'une petite poussée!”.Le joker. Il vaut mieux s'en aller la tête basse que les pieds devant.” Archimède le clochard

 P213 – Concours de nouvelles

Les poudreurs s’associent au concours de nouvelles organisé par notre petit cousin canadien « Plumes d’ici et d’ailleurs » . 
Vous enverrez dans un premier temps votre proposition aux poudreurs (vous avez jusqu’à fin décembre) et dans un deuxième temps vous pourrez vous inscrire et participer au concours de nouvelles en envoyant votre texte ( peut-être remanié).

 

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